25 April 2025

Comment déposer un brevet d’invention ?

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Comment déposer un brevet d’invention ?

Un brevet est un titre protégeant une invention technique, c’est-à-dire un produit ou un procédé qui apporte une solution technique à un problème technique donné. Le dépôt d’un brevet offre à son titulaire un droit exclusif d’exploitation sur ce dernier. Autrement dit, cela permet à l’inventeur ou à son ayant droit d’interdire à tout tiers d’exploiter l’invention sans son autorisation, pendant la durée de vie du brevet qui est de 20 ans. De ce fait, le brevet constitue un outil essentiel de valorisation tant économique que stratégique. Mais quelles sont les conditions et les étapes clés pour déposer un brevet ?

Les conditions de brevetabilité de l’invention

Avant toute chose, il faut s’assurer que l’invention soit brevetable. L’article L611-10 du Code de la propriété intellectuelle liste les conditions de brevetabilité de l’invention et dispose : « Sont brevetables, dans tous les domaines technologiques, les inventions nouvelles impliquant une activité inventive et susceptibles d’application industrielle ». Mais qu’est-ce que ça veut dire concrètement ?

Une invention nouvelle

L’article L611-11 du Code de la propriété intellectuelle dispose : « Une invention est considérée comme nouvelle si elle n’est pas comprise dans l’état de la technique. »

Cela signifie que l’invention ne doit pas porter sur une innovation qui a déjà été rendue accessible au public, quel qu’en soit l’auteur, la date, le lieu, le moyen et la forme de cette présentation au public. Il est donc primordial de préserver la confidentialité de l’invention jusqu’au dépôt.

Vérifier la nouveauté d’une invention avant son dépôt ne constitue pas une obligation légale. Cependant, ne pas le faire peut entraîner des risques importants, tant sur le plan stratégique que financier. Heureusement, il existe des outils et des méthodes de recherche adaptés, à choisir en fonction du domaine technique, du niveau d’urgence ou du contexte concurrentiel. En effectuant cette vérification, vous vous assurez par la même occasion que vous ne portez pas atteinte à un brevet déjà existant, évitant ainsi tout risque de contrefaçon.

Une invention impliquant une activité inventive

L’article L611-14 du Code de la propriété intellectuelle dispose : « Une invention est considérée comme impliquant une activité inventive si, pour un homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique ».

L’activité inventive, c’est l’idée selon laquelle une invention ne doit pas être une solution trop évidente, logique, ou facile à un problème déjà connu. C’est un critère essentiel, car la plupart des brevets sont annulés pour manque d’activité inventive, bien plus que pour le défaut de nouveauté ou d’application industrielle.

Mais qui juge si l’invention est évidente ou non ? C’est un personnage fictif qu’on appelle « l’homme du métier ». Ce n’est pas une vraie personne, mais un professionnel ordinaire et compétent dans le domaine technique concerné. On regarde alors si la solution apportée par l’invention était évidente ou non pour l’homme du métier, c’est-à-dire se demander s’il aurait pu le faire aisément. Plusieurs indices peuvent alors être utilisés pour considérer que votre invention n’est pas évidente : apporte un progrès technique réel, surmonte des difficultés importantes, répond à un besoin connu depuis longtemps…

Ce critère est subjectif mais les offices et tribunaux essaient d’être le plus méthodiques possible.

Une invention susceptible d’application industrielle

L’article L611-15 du Code de la propriété intellectuelle dispose : « Une invention est considérée comme susceptible d’application industrielle si son objet peut être fabriqué ou utilisé dans tout genre d’industrie, y compris l’agriculture ».

Une invention, pour être brevetable, doit avoir un caractère concret et pratique. Si elle est trop abstraite ou purement théorique, elle ne pourra pas être utilisée dans l’industrie (au sens large du terme), et donc ne pourra pas être brevetée. En résumé, votre invention doit pouvoir être fabriquée ou utilisée dans un domaine industriel.

Les inventions exclues de la brevetabilité

Certaines créations sont exclues de la brevetabilité car il s’agit d’idées ou de concepts trop abstraits. Tel est le cas des découvertes, théories scientifiques, méthodes mathématiques, programmes informatiques en tant que tels, ou encore les méthodes thérapeutiques ou chirurgicales.

Sont également exclus les inventions contraires à l’ordre public ou à l’éthique, les éléments du corps humain en tant que tel, les variétés végétales et les races animales obtenues par des moyens naturels.

Ces exclusions sont limitativement listées par le Code de la propriété intellectuelle des articles L611-16 à L611-19.

Les étapes du dépôt

Une fois les conditions de brevetabilité vérifiées, vous pouvez alors entamer la procédure de dépôt.

Préparation du dossier en amont

Avant de déposer une demande de brevet, il faut bien préparer le dossier. Cette étape est capitale car une rédaction insuffisante ou mal formulée peut fragiliser la protection de votre brevet. De ce fait, il est recommandé de se faire assister par un conseil ou avocat en propriété industrielle.

  • Rédiger une description complète de l’invention : elle doit expliquer clairement ce que fait l’invention, comment elle fonctionne, et à quoi elle sert.
  • Formuler des revendications précises : ce sont les phrases qui définissent ce qui est protégé. Elles doivent être claires, concises, et fondées sur la description. Mieux vaut en faire trop que pas assez, car on peut réduire le champ des revendications, mais pas l’élargir après dépôt.
  • Ajouter des dessins si nécessaire : ils permettent de mieux comprendre l’invention, mais ne remplacent jamais la description écrite.
  • Penser à la stratégie de protection : pays visés, priorité, types de titres (brevet, certificat d’utilité, etc.).

Dépôt auprès de l’organisme compètent

Une fois le dossier finalisé, vous devez le déposer auprès de l’office compétent :

  • En France, il s’agit de l’INPI (Institut national de la propriété industrielle) via une procédure en ligne.
  • En Europe, il s’agit de l’EPO (European Patent Office) (Office européen des brevets) qui offre un dépôt à l’échelle européenne. Il est aussi possible de viser plusieurs pays grâce à la procédure internationale PCT.

Le dépôt donne une date officielle, qui marque le début de la protection (et compte pour la priorité). Il est également possible de déposer une demande provisoire (procédure plus rapide et moins chère, mais à compléter ensuite)

Examen et publication

Après le dépôt, il y a dans un premier temps un examen formel, portant sur la vérification des documents, puis un examen de fond.

Cet examen porte sur les conditions de brevetabilité décrites précédemment : nouveauté, activité inventive et application industrielle. Les offices établissent par la suite un rapport de recherche qui indique si des documents antérieurs pourraient affecter la brevetabilité (état de la technique).

Il est important de préciser que l’examen est coopératif. En effet, tout au long de la procédure, vous allez échanger avec l’examinateur pour adapter, restreindre ou défendre vos revendications.

La demande est publiée 18 mois après le dépôt, ce qui permet au public de connaître l’invention. Après la délivrance, il peut y avoir une opposition dans un certain délai (9 mois à l’INPI, comme à l’OEB) par des tiers qui contestent le brevet.

Author : Dhenne Avocats.